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J'avais pourtant dit que je ne serais jamais prof...
20 janvier 2012

La Sécurité de l'Emploi

La semaine a été pourrie. Les élèves étaient survoltés, énervés et énervants. J'aurais dû me douter qu'il y avait du lourd dès lundi, quand deux élèves de 4A se sont mises à faire une partie de UNO pendant le cours. J'aurais dû me douter que ça n'allait pas être facile dès mardi, quand j'ai dû virer et coller quatre élèves en 3A parce qu'ils n'avaient pas leurs affaires et ne bossaient pas. On les abandonne une semaine et ils vous le font payer, ces sales gosses... J'aurais dû m'en douter.

Pourtant, mardi, y a eu un petit rayon de soleil. Une élève de troisième qui est venue me voir à la fin du cours pour me demander les références d'un livre, et qui m'a dit que l'an dernier, elle n'aimait pas l'anglais... mais que cette année, elle aimait bien... c'est rien... mais ça m'a fait plaisir...

Et puis hier, ça a été le point d'orgue.

Hier je me suis fait agresser par un élève.

Un incident. Une banalité qui a dégénéré. Un élève qui ne veut pas sortir, et qui s'énerve. Qui se lève. Et qui m'a mis un coup de boule.

Je n'ai rien. A peine un petit bleu à l'arcade, difficilement visible. J'ai esquivé le coup, sauvant mon nez et mes lunettes. Mais le geste demeure. Un geste d'une rare violence, un geste qui n'a pas lieu d'être. Un élève, un troisième, qui a levé la main sur un professeur. Même remplaçant. Même qui n'a pas la formation. ça ne devrait pas exister.

Je sais qu'il ne peut plus me faire de mal. Qu'il ne pourra plus m'approcher jusqu'au conseil de discipline, et que, même ensuite, je ne le reverrai plus. Parce que c'est un enfant placé, et qu'il sera changé de foyer d'accueil, envoyé ailleurs, sans doute encore plus loin de sa banlieue parisienne natale. Je sais tout ça. Mais le choc demeure. Les insultes, les menaces. Une certaine angoisse. Une grosse incompréhension. ça n'aurait pas dû se produire. Jamais. Il ne faut pas que ça se reproduise. Jamais.

Ce gars-là, il est arrivé en cours d'année. Un grand dadais. Poli. Pas désagréable. Un peu paumé, mais avec un projet professionnel. Y avait de l'espoir pour lui. Et puis on lui a fait miroiter des choses. Des choses qu'il n'avait pas la possibilité d'atteindre. Et il a fini par s'en rendre compte. Et ça a dégénéré.

Je n'accuse personne de ce qui s'est passé, que lui. Je ne sais même pas si je lui en veux. Je suppose que j'ai eu mes torts dans l'altercation. Mais ça n'aurait jamais dû en arriver là. Jamais.

Il a des copains. Je sais qu'il n'a pas eu le temps matériel de leur laisser des instructions, mais il a un portable, eux aussi. Et ses copains, ils me font peur. Ils me font peur, parce que ce sont des gamins pas finauds, parce que s'il leur demande de m'agresser en sortant du bahut, ou de défoncer ma voiture, maintenant qu'il la connaissent, je ne suis pas certaine qu'ils ne le feraient pas. Je suis même persuadée du contraire. Parce qu'ils font partie, pour la majorité, des familles de gitans qui se sont sédentarisés autour de HomeTown, et que s'ils mobilisent les nombreux cousins, oncles et frères, je ne pense pas que je pourrai être tranquille. Parce que, même si on est dans la ruralité profonde, il y a de la violence. Il peut y avoir des faits graves. Il peut y avoir un élève qui agresse un prof et que ça peut recommencer. Parce que ce n'est pas réservé à Paris et ses banlieues. Parce que je pensais être en sécurité. Et que je découvre que ce n'était qu'une illusion.

J'ai peur. Sincèrement. Je me demande comment tout ça va évoluer. Je sais que je vais porter plainte. Mais après ?

Avant je riais de la chanson "La Sécurité de l'Emploi" des Fatals Picards. Aujourd'hui, elle me fait un peu moins rire. Je sais que ça reviendra, bientôt. Mais pour le moment, elle résonne un peu trop close to home.

Voilà. Ne vous en faites pas, je vais bien. ça va passer. ça passe toujours.

cheers mates !

 

(ps : "la Sécurité de l'Emploi" des Fatals Picards, avec les paroles...)

 
le sécurité de l'emploi - fatals picards

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Commentaires
E
Si je puis me permettre, tes "élèves" potentiellement briefés par ton 3ème sur le départ, ils ont aussi internet...<br /> <br /> Soit tu dénonces carrément, sans faux semblants, soit tu attends que l'affaire, non pas se tasse, mais soit administrativement réglée avant de balancer...<br /> <br /> A mon avis...<br /> <br /> Sláinte
J'avais pourtant dit que je ne serais jamais prof...
  • Je l'ai dit, redit et répété : moi, prof ? jamais ! J'aurais pas la patience. Je ne suis pas formée pour. ça ne m'attire pas. Si c'est pour entendre les conneries habituelles au sujet de la profession... Et puis les élèves, bonjour! Et pourtant...
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